mercredi 27 janvier 2016

L'école française championne des inégalités


Par Julie Amadis
#IpEaVaEaFaF
Le 27/01/16
la France est même l'un des pays
les plus inégalitaires de l'OCDE,

après la Slovaquie et la Hongrie »


« Mettre l'école sous le signe de la compétitivité,
c'est inciter à la corruption,
qui est la morale des affaires 
».
Raoul Vaneigem


Le Canard Enchaîné rappelle que l'école française ne traite pas bien les enfants de pauvres et d'immigrés.

Mercredi 20 janvier, le Canard Enchaîné titrait
« Élèves pauvres et enfants d'immigrés à mauvaise école ».

L'école française est championne des inégalités.

Le Canard Enchaîné poursuivait :
« Principale critique de l'OCDE et récurrente depuis plusieurs années : la faible réduction des inégalités éducatives. Dans aucun autre pays l'échec scolaire n'est à ce point lié à l'origine sociale des élèves. »

  L’ÉCOLE FRANÇAISE ET SES PIÈTRES RÉSULTATS PISA

Mais la France est aussi championne des mauvaises performances de ses élèves.
« En 2012, la France a perdu 22 points en ce qui concerne la culture mathématique depuis 2000. (chiffres tirés du groupe ALPHA centre d'étude et prospective)La "performance" des élèves français en mathématiques a diminué de 16 points entre 2003 (511) et 2012 (495), ce qui en neuf ans fait passer la France des pays dont la performance est supérieure à la moyenne de l'OCDE aux pays dont la performance est dans la moyenne de l'OCDE (494 dans l'étude 2012). (Sciences et avenir) publié le 03/12/2013 La France parmi les mauvais élèves de l'enquête PISA 2012 S'agissant de la compréhension de l'écrit, les résultats de la France sont meilleurs (505 points contre 496 dans Pisa 2009), au-dessus de la moyenne des pays de l'OCDE (496), une amélioration observée depuis 2009 après un recul sensible dans les études 2003 et 2006.En sciences, le niveau de la France reste stable depuis 2006 avec 499 points (contre 501 en moyenne dans les pays de l'OCDE et 498 points dans Pisa 2009). (Sciences et avenir) publié le 03/12/2013 La France parmi les mauvais élèves de l'enquête PISA 2012

Ces mauvais résultats globaux ne sont pas très étonnants. Quand on délaisse une partie des élèves, ce sont tous les élèves qui en pâtissent. C'est l'analyse de Christian Baudelot et Roger Establet.

Les inégalités s'aggravent d'année en année.
« C'est en France que l'on observe l'un des plus grands écarts au sein de l'OCDE entre les 10 % d'élèves les meilleurs et les 10 % les moins performants. Et le fossé entre le groupe des meilleurs et celui des moins forts s'est creusé de 34 points entre 2003 et 2012, alors qu'il s'est réduit de 3 points en moyenne dans l'OCDE, de 20 points en Pologne, et même de 45 points en Allemagne ! » Alternative économique Éducation : ce qu'il faut retenir de PISA 2012, Laurent Jeanneau, 13/12/2013 
Les plus performants sont les plus riches et les moins bons les plus pauvres.
« Autre spécificité française, l'origine sociale pèse lourdement sur les résultats scolaires : 22,5 % des résultats des élèves français en mathématiques s'expliquent par l'influence du milieu social, contre 15 % en moyenne au sein de l'OCDE. De ce point de vue, la France est même l'un des pays les plus inégalitaires de l'OCDE, après la Slovaquie et la Hongrie » Alternative économique Éducation : ce qu'il faut retenir de PISA 2012, Laurent Jeanneau, 13/12/2013 
Ce qui veut donc dire que tout est mis en œuvre pour favoriser la reproduction sociale et écraser le potentiel des enfants de pauvres.

La France est aussi en haut du palmarès des élèves anxieux.

LES ÉLÈVES FRANÇAIS SONT ANXIEUX

Le rapport PISA révèle que les enfants français se sentent « mal à l'école » (L'élitisme Républicain Baudelot et Establet).
Christian Baudelot et Roger Establet ont analysé le rapport PISA 2006 et en conclut que « les élèves français sont deux fois moins nombreux que les autres pays de l'OCDE à « se sentir chez eux à l'école ».
Les élèves issus de milieux défavorisés sont parmi les plus anxieux.
Stanislas Dehaene, professeur et chercheur en psychologie cognitive analyse le rapport PISA 2012 et écrit :
« En France, les élèves issus d’un milieu socio‐économique défavorisés n’obtiennent pas seulement des résultats nettement inférieurs, ils sont aussi moins impliqués, attachés à leur école, persévérants, et beaucoup plus anxieux par rapport à la moyenne des pays de l’OCDE. »

POURQUOI LA FRANCE EST - ELLE CHAMPIONNE DES INÉGALITÉS ?

L'OBJECTIF PREMIER EST DE REPRODUIRE LES CLASSES SOCIALES

L'objectif est de reproduire des classes sociales spoliatrices.
Ces classes sont la Formoisie (bourgeoisie des diplômes) et la Bourgeoisie.
Ce sont elles qui ont le pouvoir... Ce sont elles qui décident des orientations de l'école, ce sont elles qui enseignent.
Comme le souligne Pierre Bourdieu, les enseignants formois par définition et issus dans leur majorité de la classe formoise sont persuadés du bien fondé du système et le perpétuent.
"Produits d'un système voué à transmettre une culture aristocratique dans son contenu et dans son esprit, les enseignants sont enclins à en épouser les valeurs avec d'autant plus d'ardeur peut-être qu'ils lui doivent plus complètement leur réussite universitaire et sociale. En outre, comment n'engageraient-ils pas, même et surtout à leur insu, les valeurs de leur milieu d'origine ou d'appartenance dans leurs manières de juger et dans leurs façons d'enseigner ? "(P.Bourdieu L'Ecole conservatrice. Les inégalités devant l'école et devant la culture, Revue française de Sociologie, 1966)

  L’ÉCOLE FAVORISE LES CODES SOCIAUX DES CLASSES DOMINANTES

Alors comme le disait Bourdieu, les codes de l'école sont les codes des classes dominantes.
(...) la tradition pédagogique ne s'adresse en fait, sous les dehors irréprochables de l'égalité et de l'universalité, qu'à des élèves ou des étudiants qui sont dans le cas particulier de détenir un héritage culturel conforme aux exigences culturelles de l'école. Non seulement elle exclut l'interrogation sur les moyens les plus efficaces de transmettre complètement à tous les savoirs et le savoir-faire qu'elle exige de tous et que les différentes classes sociales ne transmettent que très inégalement, mais encore elle tend à dévaloriser comme « primaires au double sens de primitives et de vulgaires) et, paradoxalement, comme «scolaires les actions pédagogiques tournées vers de telles fins. Ce qui n'est pas un hasard si l'enseignement primaire supérieur qui, lorsqu'il était en concurrence avec le lycée classique, dépaysait moins les enfants originaires des classes populaires, s'attirait le mépris de précisément parce qu'il était plis explicitement et plus méthodiquement  scolaire ». (P.Bourdieu L'Ecole conservatrice. Les inégalités devant l'école et devant la culture, Revue française de Sociologie, 1966)
Ceux qui réussissent ne sont pas les plus intelligents, mais ceux qui connaissent les codes. Donc, ce sont les enfants issus des classes dominantes.

LES PARENTS DE MILIEUX DÉFAVORISES SONT DISTANTS PAR RAPPORT A L’ÉCOLE QUI LES EXCLUT ET EXCLUT LEURS ENFANTS

Le rôle de reproduction sociale de l'école est de moins en moins facilement dissimulable. Les parents des milieux défavorisés l'ont compris et/ou le ressentent. Ils se montrent ainsi distants vis à vis de cette institution.

Très récemment, Christian Laval, Francis Vergne, Pierre Clément et Guy Dreux ont écrit « La nouvelle école capitaliste ». Ils expliquent comment l'école s'est marchandisée et libéralisée. Cet état de fait a aggravé les inégalités et exclu les classes populaires du savoir. L'école pour eux est synonyme d'exclusion. Ils s'en méfient donc et s'en éloignent.
Les auteurs du livre écrivent :
« La plupart des conduites d'évitement de la part des parents ne sont pas difficiles à déchiffrer. Elles témoignent de la hantise d'un contexte social qui pénaliserait leurs enfants, de la peur des mauvaises influences qui risqueraient d'exercer des élèves peu aptes, voire hostiles, au travail scolaire dans les écoles populaires quand elles sont le « réceptacle des problèmes sociaux du quartier ».

DEUXIÈME OBJECTIF : TRANSFORMER LES ENFANTS
 NATURELLEMENT INNOVANTS EN RÉPÉTANTS DOCILES

 S'ajoute à cette lutte de classes pour une école reproductrice de classes spoliatrices, une lutte de strates des adultes Répétants envers des enfants Innovants.

Les enfants sont des Innovants.
" TOUS LES ENFANTS sont membres de la strate des Innovants.
Tous les enfants sont des Innovants découvreurs
Tous les enfants sont des Innovants inventeurs.
Tous les enfants sont des Innovants créateurs.

Le savoir plus la bonne foi produit de la gentillesse.
Cette découverte est un des socles de la science psychologique à construire.
Mais les mêmes ingrédients font que les enfants sont tous des REdécouvreurs conceptualisateurs, tous de RE-inventeurs et tous de CREATEURS artistiques." (Revactu Yanick Toutain)

Mais ce caractère Innovant des enfants n'est absolument pas respecté. Pire. Il est détruit.
Au fur et à mesure que les enfants grandissent, leur potentiel créatif et innovant s'étiole pour finir par disparaître.
A la place, née peu à peu un individu obéissant à des normes sociales qui n'ont pas de fondement logique. Un individu, qui, à force d'obéir, de recevoir des ordres, de recevoir des violences verbales et parfois physique aussi, perd toute envie de créer, d'explorer et de découvrir. Le voilà bien prêt à entrer dans le monde des adultes "moutons", "pathologistes consuméristes" et Répétants.
En même temps que ses capacités créatives se détruisent, ses capacités d'empathie et de solidarité s'abîment.
Apprendre à "obéir" à une autorité juste parce que la personne à un statut hiérarchique élevé construit des individus capables d'aller jusqu'à tuer... Tuer, juste parce que une autorité légitimé par une organisation sociétale le leur a demandé.
Les expériences psychologiques organisées par Stanley Milgram entre 1960 et 1963 prouvent que face à une autorité la très grande majorité des Etasuniens envoyaient des décharges électriques tellement importantes qu'elles auraient pu tuer le cobaye comédien.
Cette expérience a été racontée dans le film d'Henri Verneuil "Comme Icare". La vidéo ci- dessous en est un extrait.

COMMENT FAIT L'ÉCOLE FRANÇAISE POUR EMPÊCHER
 LES ENFANTS DE PAUVRES DE RÉUSSIR ?

Pour que le diplômé puisse « vendre » son diplôme sur le marché du travail, il faut que ceux qui le détiennent soient peu nombreux. Le futur diplômé a donc intérêt financièrement à ce que ses camarades de classe échouent.
La dynamique de classe devient la loi de la jungle, loi du plus fort dans laquelle il faut écraser l'autre. Nombreux sont les étudiants d'écoles élitistes qui ont témoigné de cela. Je l'ai moi même vécu et subi en tant qu'étudiante (surtout quand je préparais le concours de professeur des écoles en Master Enseignement).
Raoul Vaneigem conclut ainsi que « mettre l'école sous le signe de la compétitivité, c'est inciter à la corruption, qui est la morale des affaires ».
La compétition est antagoniste à l'art et à la véritable science. Il n'y a pas de « performance » dans la création ni dans la découverte !
Le diplôme implique un système d'évaluations, de notes. Les notes humilient les élèves les plus en difficulté et les figent dans l'échec par une étiquette de "mauvais élève".
"Donner des notes" sous tend une pédagogie autoritaire. Seule une autorité hiérarchique a le pouvoir d'émettre une notation, de porter un jugement sur un individu et de choisir les critères de ce jugement.
Jean Piaget considère que le pouvoir suprême que détient le maître d'école entrave les capacités réflexives de l'enfant.

« Le prestige qu'il possède aux yeux de l'enfant fait que celui-ci accepte toutes faites les affirmations émanant du maître et que l'autorité le dispense de réflexion ». (Piaget 1959 p 269 dans L'apprentissage coopératif d'Alain Baudrit p 14)
De même Jean Houssaye dénonce ce rapport d'autorité éducative qui développe le sentiment de peur chez l'élève :
"Dès lors le rapport d'autorité entre l'éducateur et l'éduqué ne peut être qu'un rapport vertical, où le supérieur ordonne au nom de son âge et où l'inférieur obéit sans contestation. un tel rapport d'autorité implique des techniques éducatives basées sur la contrainte et la peur. La peur est le moyen que l'éducation traditionnelle utilise pour faire respecter les règles, les lois et les préséances vitales qui ordonnent toute la vie sociale." p 9 Jean Houssaye La Pédagogie traditionnelle  
Le diplôme, les notes impliquent une pédagogie de l'ennui et de la Répétition. Les diplômes attestent d'abord de la restitution des connaissances.
Le bachotage, le par cœur, la répétition de résolutions d'exercices mobilisant un processus intellectuel identique à chaque fois sont la base de la pédagogie traditionnelle - pédagogie très majoritairement pratiquée dans les classes.
Jean Houssaye montre que la pédagogie traditionnelle est celle des enseignants en France dans leur très grande majorité.
« A l'issue de ce parcours, nous pouvons donc l'affirmer sans ambiguïté : la pédagogie traditionnelle existe, la pédagogie traditionnelle est contemporaine. Les spécialistes de l'éducation ne cessent d'en parler. Dans les propos tenus, il faut d'abord retenir ceci : le changement dans le système scolaire ne se fait pas. » Jean Houssaye La pédagogie traditionnelle éditions Fabert p 74
Les innovations n'entrent quasiment pas à l'école.
« L'innovation pédagogique, à l'échelle de l'institution, est un échec ; elle ne produit pas d'effets positifs pour une raison majeure : elle n'est pas mise en œuvre et l'immobilisme des acteurs est patent. Et pourtant le cœur de l'école est touché, tant par rapport aux savoirs que par rapport aux comportements. » Jean Houssaye La pédagogie traditionnelle éditions Fabert p 74
Les pédagogues innovants comme Celestin Freinet et Alexander Sutherland Neill, Maria Montessori étaient opposés aux notes. Leur pédagogie basée sur l'expérimentation, l'exploration et la découverte ne pouvaient pas être adaptée à un système de notation et de délivrance de diplômes.

Ces pédagogies qui respectent l'enfant Innovant sont ultra minoritaires en France. Comme le dit Jean Houssaye c'est la routine qui domine.
"Individualisme donc, routines ensuite. Durand (2001) souligne combien la préservation des routines sécurisantes entre en jeu dans la permanence de la pédagogie traditionnelle. Quels que soient les disciplines enseignées et les enseignants concernés, les routines prédominent ; les constantes et les régularités marquent la vie dans la classe." Jean Houssaye La pédagogie traditionnelle éditions Fabert p 37 

Les diplômes, les examens de toutes sortes, les notes sont les outils pour exclure définitivement une partie des enfants du monde de ceux qui apprennent et qui savent.
Comment continuer à « aimer » apprendre quand vous avez vécu l'exclusion et porté l'étiquette de celui ou celle qui n'est pas intelligent.

Comme la science est incarnée par l'école dans notre société, les exclus du système scolaire fuient la découverte et la science pour se protéger.
Concernant la créativité, « ces exclus scolaires » ne semblent être ni plus ni moins créatifs que les autres. Certains ont été trop « cassé » pour avoir pu garder un « élan créatif » en eux, d'autres ont réussi à résister par l'art. Mais dans ce processus d'exclusion, on a appris à tous les enfants à « accepter l'injustice » et les « inégalités ». Ainsi qu'à se mentir pour accepter inacceptable.
L 'opération mentale qui consiste à se mentir contribue peut être aussi à la destruction des capacités
créatives.


Il suffit de discuter 30 minutes avec n'importe quel jeune scolarisé pour se rendre compte que les chiffres du Canard Enchaîné ne sont que la partie émergée d'une situation bien plus grave. 




mercredi 20 janvier 2016

Augmentation de 7,3 % de la mortalité en France en 2015 mais l'Etat se montre incapable d'expliquer cette hausse vertigineuse !

source
Par Julie Amadis
#IpEaVaEaFaF
Le 20/01/2016



Aujourd'hui nous apprenons que :
- La mortalité a augmenté de 7,3 % en France en 2015, soit 41000 décès de plus qu'en 2014. Au total, 60000 français sont morts en 2015.Vanessa Bellamy et Catherine Beaumel de la division Enquêtes et études démographiques relèvent qu' il n'y a pas eu autant de mort depuis la Seconde Guerre mondiale.
Le titre de présentation des données démographiques de 2015 de l'Insee est d'ailleurs très parlant : Le nombre de décès au plus haut depuis l'après-guerre.
- L'espérance de vie a baissé de 0,4 % pour les femmes et de 0,3 % pour les hommes. C'est la première baisse de l’espérance de vie depuis 1969.
"En 2015, 600 000 personnes sont décédées en France ; il s'agit du niveau le plus élevé depuis l'après-guerre. Le nombre de décès a augmenté de 41 000 (+ 7,3 %) par rapport à 2014, après deux années de recul." (INSEE Bilan démographique 2015)
Dans un même temps, le journal Libération nous révèle que en France "54 % de l'augmentation des richesses entre 2000 et 2015 ont été accaparés par les 10 % les plus riches".
Nous apprenons aussi dans ce même article qui s'appuie sur le dernier rapport Oxfam que "1 % de la population mondiale possède autant que les 99 % restants" (Libération du 19/01/2016)

UNE HAUSSE DE 7,3 % DES DÉCÈS EN FRANCE
MAIS PAS D'EXPLICATION SÉRIEUSE A CETTE HAUSSE


L'INSEE n'explique pas vraiment cette hausse importante de la mortalité.
Nous savons néanmoins que les plus de 65 ans sont ceux qui sont le plus touchés.
Si les taux de mortalité à chaque âge ne variaient pas, l'augmentation du nombre de personnes de 65 ans ou plus conduirait à une hausse tendancielle du nombre des décès. Les années passées, cette hausse était atténuée et parfois plus que compensée par la baisse de la mortalité. En 2015, au contraire, les taux de mortalité se sont accrus, particulièrement aux âges élevés. Cette hausse de la mortalité est liée principalement à des conditions épidémiologiques et météorologiques peu favorables.(INSEE Bilan démographique 2015)
Mais les causes présentées à cette hausse de  41000 décès entre 2014 et 2015 ne sont pas suffisantes.

 L'Insee avance les causes suivantes :
"L'épisode grippal, long (9 semaines) et de forte intensité, a eu un impact relativement sévère chez les personnes de 65 ans ou plus. Le vaccin n'était pas efficace contre certains virus et la couverture vaccinale des personnes de plus de 65 ans a baissé. En outre, le virus majoritaire lors de cet épisode est connu pour avoir provoqué des complications chez les personnes fragiles. Ensuite, au mois de juillet 2015, caniculaire, 2 000 décès supplémentaires ont eu lieu par rapport à juillet 2014. Enfin, 4 000 personnes supplémentaires sont décédées en octobre 2015 par rapport à octobre 2014, probablement en raison des vagues de froid survenues au milieu du mois." (INSEE Bilan démographique 2015)

LES MORTS CAUSES PAR LE RÉCHAUFFEMENT CLIMATIQUE ET A LA GRIPPE NE SONT PAS SUFFISANTES
POUR EXPLIQUER LES 41000 DÉCÈS SUPPLÉMENTAIRES

Regardons à la loupe les différents chiffres.

Le réchauffement climatique et l'incapacité de l’État providence à y faire face sont responsables de 6000 morts. On a 2000 morts de la canicule et 4000 morts du froid.
"Ensuite, au mois de juillet 2015, caniculaire, 2 000 décès supplémentaires ont eu lieu par rapport à juillet 2014. Enfin, 4 000 personnes supplémentaires sont décédées en octobre 2015 par rapport à octobre 2014, probablement en raison des vagues de froid survenues au milieu du mois." (INSEE Bilan démographique 2015)

LA CANICULE DE JUILLET 2015 A TUE 2000 PERSONNES

La canicule avait déjà tué 15000 personnes en 2003 !
Le 2 juillet 2015, en pleine canicule j'écrivais :
" Au Havre, il y a quinze jours nous portions encore nos gros manteaux d'hiver.Deux semaines plus tard, nous devons supporter de fortes chaleurs . 32° mercredi 1 juillet au Havre, une des villes les plus froides de France pourtant. Mais la température moyenne en été est de 17°C soit 10 degrés de moins que celles que nous subissons actuellement.15000 PERSONNES MORTES EN 2003 COMBIEN EN 2015 ?
La canicule avait tué 15000 personnes  en France en 2003. combien seront-elles en 2015 ?"
(...)
"Ce que nous subissons n'est que le début d'un phénomène catastrophique...
En effet voici 150  ans que les capitalistes détruisent la planète. Mais ils accélèrent cette destruction depuis 30 ans.
 Le climat change, les catastrophes naturelles se multiplient...Tout ça à cause de l'industrialisation irresponsable, de leurs machines et leurs véhicules remettant dans l'atmosphère le carbone stocké dans les plantes devenues charbon, pétrole, gaz.....
Les études scientifiques montrent la corrélation entre l'activité industrielle et le mode de vie occidental du 20° et 21° siècle et la formation du couvercle carbone.
Deux climatologues Retto Knutti et Erich Markus Fischer , de l’Institut pour l’atmosphère et la science du climat à Zurich (Suisse), montrent qu'il y a corrélation entre le développement du capitalisme et le réchauffement climatique :
Un couvercle carbone qui empêche les photos de quitter notre planète et qui réchauffe la Terre.
Les deux climatologues ont puisé dans une «mine» de données informatiques mise à disposition de tout chercheur. Rien moins que toutes les simulations climatiques, réunies dans un programme mondial de comparaison. Elles comportent des simulations «contrôle» - le climat avant notre injection massive de gaz à effet de serre. Knutti et Fischer ont donc pu comparer ce climat préindustriel avec l’actuel, plus chaud de 0,85°C. Et avec des Terres virtuelles plus chaudes de 2°C et 3°C que le climat préindustriel. (Libération)"

La canicule : le début d'un phénomène catastrophique qui commence la destruction de notre planète

LA VAGUE DE FROID D'OCTOBRE 2015 A TUE 4000 PERSONNES

Mi-octobre une vague de froid a touché la France. Les température étaient de 6 à 13° en dessous des normales de saison. Les scientifiques savent bien que ces températures anormales ne sont que les prémices d'une catastrophe climatique bien plus grande... Catastrophe dont les capitalistes sont responsables.

Le Figaro le 16 octobre 2015 notait :
La France a enregistré localement ces derniers jours des records de froid depuis 40 ans, notamment à Langres (Haute-Marne) et dans le grand Sud-Ouest où des gelées très précoces ont été observées. "Localement et ponctuellement, il a fait les valeurs les plus basses depuis 40 ans" mais "ce n'est pas le mois d'octobre le plus froid depuis 40 ans" en France, selon Patrick Galois, prévisionniste à Météo-France. (Le Figaro)
Le froid tue encore en France ! Les personnes qui vivent dans des logements insalubres, et ou avec des appareils de chauffage non efficaces,  qui n'allument pas le chauffage de peur de ne pas pouvoir payer la facture sont nombreuses.
Le journal "La dépèche" révèle que 4 à 5 millions de ménages sont en précarité énergétique.

La vague brutale de froid vient nous le rappeler cruellement: se chauffer est devenu un luxe pour les plus pauvres, pour ceux qui vivent dans des logements considérés comme des passoires énergétiques, sans isolation, sans les moyens d'infléchir la courbe inexorable des dépenses dites contraintes. On estime qu'en France, 4 à 5 millions de ménages sont en situation de précarité énergétique avec des factures de gaz ou d'électricité supérieures à 10% des revenus. (La dépèche)
Et c'est parmi ces gens là que l'on va trouver les 3000 morts de froid...
On remarque d'ailleurs que la presse n'a pas parlé de ces 3000 morts du froid ! On en entend parler que 3 mois après quand il est question de justifier ces 41000 morts supplémentaires sur l'année 2015 !

 L'INSTITUT DE VEILLE SANITAIRE ÉVALUE UNE AUGMENTATION DE MORTALITÉ DUE A LA GRIPPE DE 18300 DÉCÈS

La troisième raison indiquée est l'épidémie de grippe qui a été particulièrement longue.

L'Institut de veille sanitaire comptabilise seulement 18300 décès de plus dûs à la grippe, dont 47 % chez les 65 ans et plus.
Impact important
- Près de 30 000 passages aux urgences pour grippe
- 3133 hospitalisations parmi ces passages dont 47% chez les 65 ans et plus
- 1558 cas graves de grippe admis en réanimation
- Excès de 18 300 décès toutes causes pendant l’épidémie de grippe, concernant à 90% les sujets âgés de plus de 65 ans
- Cet excès de mortalité est lié à la grippe et à d’autres facteurs hivernaux (INVS (Institut de veille sanitaire)

16700 MORTS INEXPLIQUÉS


Il reste donc 16700 morts inexpliqués.

Alors l'Insee donne une 4° explication, très vaseuse. La population des plus de 65 ans aurait particulièrement augmentée.

Sauf que le nombre des plus de 65 ans n'a augmenté que de 343 personnes entre 2014 et 2015.
La variation de population des plus de 65 ans est stable depuis 2012 (conf graphique).

L'argumentation de l'augmentation du nombre des personnes âgées en France entre 2014 et 2015 n'est donc pas recevable pour expliquer cette exceptionnelle augmentation de mortalité en 2015.

AUGMENTATION DU NOMBRE DE PERSONNES ÂGÉES PAUVRES ?

Nous ne trouvons aucun chiffre concernant la mortalité des français en fonction de leur niveau de richesse.
En faisant une recherche sur la toile, on découvre que le Secours Catholique reçoit de plus en plus de personnes âgées.
Selon le rapport annuel du Secours catholique paru jeudi, 8,5 % des personnes aidées par l’organisation caritative avaient plus de 60 ans en 2013, contre 5 % en 2000. (Atlantico)
Cependant, le manque d'informations statistiques institutionnelles nous empêchent d'expliquer avec précision les raisons de cette augmentation de mortalité en 2015.

AUCUNE INFORMATION SUR LE TAUX DE MORTALITÉ DES FRANÇAIS
EN FONCTION DE LEUR RICHESSE DE LA PART DE L 'INSEE


L'Obs nous indique que l'Insee a pour projet d'inclure les CSP des français dans les calculs d'espérance de vie dans les années à venir :
"Conscient de l’importance de tels chiffres, l’Insee planche actuellement sur des outils de mesure plus précis, notamment avec la future création d’indices de l’espérance de vie basés sur les catégories professionnelles des Français et, pour la première fois dans l'Hexagone, selon leur niveau de diplôme." (L'Obs)
Cependant nous imaginons bien que les personnes âgées vivant sous le seuil de pauvreté, de plus en plus nombreuses, se nourrissent moins bien, se chauffent moins bien et sont moins bien soignés que celles qui gagnent bien leur vie.

Nous pouvons tout aussi bien supposer que la destruction des services publiques, la surpopulation dans les hôpitaux etc... a de grosses conséquences sur la mortalité.... La grippe n'aurait pas dûE faire autant de morts dans un  pays riche comme la France ! La canicule non plus...

Mais détailler les chiffres.... seraient trop dangereux.... pour une oligarchie .... en déliquescence .
pour les 10 % qui se sont accaparés 54 % de l’augmentation des richesses entre 2000 et 2015 !


lundi 18 janvier 2016

Pourquoi empêcher l'enfant d'apprendre à lire comme il a appris à parler ?

Célestin Freinet et ses élèves
par Julie Amadis
#IpEaVaEaFaF
Le 18/12/15





  L'ENFANT APPREND A PARLER SANS "LEÇONS DE LANGAGE"


Comment l'enfant apprend-il à parler ?


L'enfant apprend le langage en vivant avec d'autres êtres humains qui lui parlent et qui se parlent entre eux.
Il observe, expérimente en bougeant les lèvres et en émettant des sons, puis il devine peu à peu le sens des mots selon le contexte.
Il n'y a pas de "leçon" pour apprendre à parler.
Il n'existe pas non plus de personne titulaire d'un diplôme pour apprendre à parler aux enfants.
Et pourtant, tous les jeunes enfants, quel que soit le milieu dans lequel ils sont, savent s'exprimer oralement.


Pour apprendre à parler, l'enfant commence à emmagasiner tout un tas d'informations.
C'est la somme des connaissances, observations, découvertes intégrées  inconsciemment qui amène l'enfant à parler.
Maria Montessori insiste sur le caractère construit des nouvelles capacités des enfants alors que rien auparavant n'était apparu.

"Ces processus ne conduisent pas à une expression immédiate, ils sont emmagasinés dans l'attente du moment où le langage naîtra"
Les enfants à qui on parle normalement sans gagatiser sautent parfois des étapes et ne progressent pas selon un schéma qui va du simple au plus complexe.
Ainsi un ami me racontait "la première fois que son fils a parlé" :
"Onel a pati bateau"
Ce qui voulait dire "Lionel est parti voir les bateaux". Le petit garçon de 15 mois était plutôt en retard sur son âge. Il ne prononçait quasiment aucun mot intelligible.
Tout à coup, il énonça un phrase quasiment complète.  
Pour apprendre à parler, son fils n'était pas passé par les sons, les syllabes, les mots. Il avait tout de suite prononcé une phrase entière, dans l'ordre grammatical correct avec le sujet, le verbe et le complément.

Le bébé a accumulé en amont, expériences et observations ... pour que d'un seul coup, il soit capable de savoir aligner des sons, des syllabes, des mots, dans le bon ordre pour que ça ait un sens.

APPRENDRE A PARLER, APPRENDRE A LIRE : MÊME PROCESSUS

Maria Montessori

  CÉLESTIN FREINET ET LA MÉTHODE NATURELLE


Célestin Freinet comme Maria Montessori considéraient que la meilleure façon d'enseigner était de donner les outils aux enfants pour qu'ils acquièrent par eux-même le savoir.
Ces deux pédagogues ont confiance dans les capacités extraordinaires de l'enfant.
Célestin Freinet a d'ailleurs choisi de nommer sa méthode "la méthode naturelle". Il décrit sa façon d'enseigner à lire et à écrire aux enfants :
«Notre méthode naturelle d’écriture-lecture est essentiellement une méthode de vie»
Freinet s'offusque contre les méthodes de lecture et d'écriture qui consistent à ordonner à l'enfant de conscientiser la linguistique alors qu'il ne la pratique pas encore.
Celestin Freinet
« Les processus scolaires partent avec ostentation de l’intellect, de la théorie, de la science abstraite, vers la pratique plus ou moins ajustée au comportement. Démarche profondément anormale, naturelle et complexe, vers la différenciation, la comparaison, l'exploration et la loi. Ce rétablissement sera une des grandes victoires de notre pédagogie populaire »
Les enfants qui apprennent à lire avec la pédagogie Freinet ne lisent pas les mots - syllabe après syllabe - mais, d'un seul coup, ils se mettent à lire un mot entier puis une phrase.

Contrairement à ce que pensent beaucoup d'adultes, les enfants ne vont pas du plus simple au plus complexe pour apprendre.
Pour apprendre à parler comme pour apprendre à lire, il n'y a pas de gradation dans la difficulté au sens où les adultes l'entendent.
Célestin Freinet fait cette constatation concernant la lecture.
Les enseignants qui utilisent cette méthode (si l'on peut dire) font la même observation chez leurs élèves.
Un enseignant remplaçant dans une classe "Freinet" de CP explique que dès la rentrée les enfants avaient commencé - en 1980 - à apprendre à lire avec une phrase votée par eux :

"Le père de Vincent Hébert a acheté une maison"

Nombreuses sont les difficultés dans cette phrase. Et pourtant... La motivation à apprendre est telle quand on part d'une phrase choisie par les élèves - qui correspond à un moment de vie - que les difficultés sont vite surpassées par les enfants.
J'ai fait le même constat dans la première classe dans laquelle j'ai enseigné. C'était un CP. J'étais suppléante dans une école privée et donc j'étais forcée de travailler sur la méthode de la titulaire qui était une méthode syllabique. Face au blocage d'un certains nombres d'élèves qui n'entraient pas dans la lecture, et sur les conseils d'une institutrice Freinet à la retraite, Josette Hazard, j'ai transformé la première séquence de la journée - mise en place par la titulaire en outil de lecture.
Le "Quoi de neuf ?" du matin consistait pour les enfants en un petit exposé à partir d'un objet, d'un événement etc.....
Après chaque prestation de "Quoi de neuf ?", les propositions orales de phrases résumant ce qu'avait dit l'élève au tableau étaient inscrites. Parmi celles-ci, les enfants choisissaient leur préférée. Ils la recopiaient sur une feuille. Ensuite, ils découpaient les mots et les remettaient dans l'ordre pour faire une phrase....
Après ces premières séquences, les gamins les plus en difficulté en lecture avaient accès à l'un des deux ordinateurs de la classe, sur lequel ils recopiaient la phrase choisie. Ils l'imprimaient ensuite et pouvaient l'afficher où bon leur semblait.
Souvent ces enfants en difficulté dessinaient en dessous de la phrase, et les parents me racontaient qu'ils affichaient les phrases dans la chambre et s'amusaient à relire les phrases du "quoi de neuf". C'est de cette manière que des enfants hostiles à la lecture y ont pris goût et ont rapidement rattrapé leur retard.

Les enfants apprennent à lire comme ils apprennent à parler, par l'observation, l'expérimentation. Ce déclic provient de l'ensemble de leurs expérimentations, tâtonnements, comparaisons... conscientes et inconscientes.
Comme le bébé décrit par Maria Montessori, l'enfant lecteur débutant, a emmagasiné un grand nombre de mots, de graphies dans des contextes multiples (les noms des magasins, des produits alimentaires, les titres de livres,,les panneaux d' informations routières...) et .... un jour... cet enfant se met à lire...

Forcer l'enfant à apprendre selon la propre logique d'un adulte borné, qui imagine, qu'il faut à tout prix pour réussir, que l'enfant passe des sons simples aux sons complexes, puis des syllabes simples aux plus complexes, sans jamais donner de sens à l'activité de lire, a des conséquences désastreuses pour les enfants.

APPRENDRE A PARLER PAR LE SYLLABIQUE ?


Célestin Freinet dénonce le forçage de l'adulte à faire entrer l'enfant dans sa logique de progression de l'apprentissage.
"Si des professeurs devaient apprendre à parler à des enfants, ils le feraient selon les principes que nous connaissons, qu'ils supposent logiques, en partant des sons simples et du b a ba traditionnel, par un escalier méthodique inéluctable. Or, dans la pratique, nous constatons, par la méthode naturelle, que les enfants progressent selon les principes différents à base de vie, et qu'ils ne craignent pas de s'attaquer aux vocables les plus difficiles s'ils s'intègrent dans la construction active de leur comportement effectif. Ils ne partent pas nécessairement de l'élément simple, mais abordent au contraire d'emblée le complexe vivant du mot et de la phrase." p 234 Œuvres pédagogiques Tome 2, 1994
La progression organisée par le professeur pour permettre à l'enfant d'acquérir une notion, une capacité, une nouvelle connaissance ne prend pas en considération le processus psychique interne à l'enfant, ses propres expérimentations...
Les programmes scolaires indiquent les compétences à acquérir par cycle. Tous les inspecteurs exigent des enseignants la rédaction de programmations et progressions pour chaque discipline. On enseigne aux élèves telle ou telle nouvelle notion à telle date selon une progression définie à l'avance puis l'enseignant passe à autre chose.
L'enfant est considéré comme un vase que l'on remplit en le gavant de connaissances décontextualisées.
Les réactions des enfants, leurs propres découvertes et expérimentations n'ont pas de place ou très peu dans ce fonctionnement pédagogique institutionnel.
Pourtant, il n'y a pas de gradation dans l'apprentissage au sens où la plupart des adultes l'entendent. L'évolution dans les acquisitions enfantines est propre au cheminement expérimental de l'enfant.

RALENTIR SON ÉVOLUTION DE FAÇON IRRÉMÉDIABLE


Les enfants sont probablement retardés dans leurs activités intellectuelles inconscientes quand une autorité scolaire les force à dévier leur propre processus pour apprendre à lire. On déconstruit probablement tout ce que leur psychisme a élaboré en les forçant à apprendre à lire avec des syllabes. Celestin Freinet dénonce ces pratiques enseignantes utilisées dans la quasi totalité des écoles.
"Si au moment où l'enfant est en plein tâtonnement expérimental pour acquérir la maîtrise du langage, on arrêtait systématiquement et d'une façon autoritaire son effort complexe pour lui enseigner la prononciation et la lecture de mots extérieurs à sa personnalité et à sa pensée, il se produirait comme un désarroi et un déséquilibre qui ralentiraient certainement son évolution, peut être même d'une façon irrémédiable"
Maria Montessori fait un constat similaire à celui de Ceslestin Freinet :
"En réalité l'enfant porte en soit dès l'origine la clef de son énigmatique existence individuelle. Il dispose d'un plan de structuration inné de son âme et de lignes directrices programmées pour son développement. Tout cela est d'abord extrêmement frêle et sensible et l'intervention intempestive de l'adulte, avec sa volonté et ses idées exagérées de la perfection de son autorité propre, peut anéantir ce plan ou en compromettre sa réalisation." (Maria Montessori, propos repris par Jean Houssaye, dans Quinze pédagogues, p 402) 

LES ENFANTS APPRENNENT DE MANIÈRE INCONSCIENTE
"L'ESPRIT ABSORBANT" de Maria Montessori

Pour Maria Montessori, si les enfants apprennent si rapidement et par bloc, c'est que cet apprentissage n'est pas conscient, 

L'enfant accumule tout un tas de données, observations, connaissances, liens logiques entre les savoirs sans s'en rendre compte.
"Incontestablement, ces processus complexes ne suivent pas les processus de
fonctionnement qui seront établis chez l'adulte : l'enfant n'apprend pas à parler comme nous apprenons une langue étrangère, grâce à l'effort conscient et volontaire des facultés mentales."
 Elle compare le processus d'apprentissage de l'enfant à l'embryon qui se transforme en bébé sans que l'on puisse apercevoir vraiment ce qui a contribué à cette évolution.
"Pourtant, il crée une construction stable, exacte, étonnante, analogue à la construction embryonnaire des organes dans l'organisme en gestation. Il existe donc chez le tout petit un état mental inconscient, créatif, que nous avons appelé "l'esprit absorbant""
Ce qui se passe dans le cerveau de l'enfant avant qu'il ne fasse une phrase n'est pas visible.  Nous ne percevons que le résultat d'un processus inconscient.
Ce mécanisme psychique dont l'enfant n'a pas conscience est efficace. Le bébé met peu de temps pour apprendre à parler au vue de la complexité de la langue.
"Ce ne sont là que des suppositions, mais il n'en demeure pas moins que des développements internes dirigés par des énergies créatives interviennent et que ces développements peuvent arriver à maturité avant de se manifester à l'extérieur. Et dès qu'ils se manifestent, ils se révèlent être des caractères construits pour faire partie de l'individualité." (Maria Montessori)

Si, pour apprendre une langue étrangère, tous les spécialistes s'accordent à dire qu'il est préférable de baigner dans la langue en vivant dans le pays plutôt que de prendre des cours tous les jours à l'université, c'est que l'apprentissage inconscient est plus efficace que l'apprentissage conscient.
"De ce fait, il doit pouvoir exister dans l'inconscient un mode de fonctionnement psychique différent de celui de l'esprit conscient". (Maria Montessori la formation de 'l'homme, éditions Desclée de Brouwer, 2005)

 VIVRE C'EST APPRENDRE :
LES ENFANTS N'ATTENDENT PAS QUE L'ON LEUR ENSEIGNE
 LES CHOSES POUR LES APPRENDRE

Il faut faire confiance dans les capacités naturelles d'apprentissage des enfants et ne surtout pas intervenir dans le processus psychique qui les amène à acquérir de nouvelles connaissances et capacités. L'enseignant accompagne l'enfant dans le processus d'apprentissage. Il ne doit pas intervenir de manière autoritaire en le déviant de son propre mécanisme.
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Apprendre, c'est vivre. C'est un processus naturel. Et les enfants n'attendent pas que l'on leur enseigne quelque chose pour apprendre.
John Holt décrit le fonctionnement des enfants :
"Quand ils ne sont pas en train de manger ou de dormir (et encore !), ils créent du savoir. Ils observent, pensent, spéculent, théorisent, testent et expérimentent - en permanence - et ils sont bien meilleurs que nous, adultes, à ces tâches" (Les apprentissages autonomes)
Cette thèse est une des principales du postmarxisme : les enfants sont spontanément des Innovants, des Découvreurs, des Inventeurs, des Créateurs artistiques.
L'enfant apprend chaque heure chaque minute chaque seconde de sa vie. Il n'a bien sûr pas conscience, la plupart du temps, qu'il est en train d'apprendre des choses.
Comme cet apprentissage est efficace, bien que nous ne connaissons pas tout le cheminement de ce processus, il est important de laisser l'enfant découvrir le monde sans pour autant intervenir de façon autoritaire.
John Holt considère que forcer les enfants à avoir conscience de ce qu'ils apprennent est une erreur :
"L'une des grandes erreurs que nous connaissons avec les enfants est de les rendre conscients de leurs apprentissages" (les apprentissages autonomes, p 25)
Pourtant "rendre conscient les enfants de leurs apprentissages" est le nouveau dogme pédagogique du 21° siècle en France. 

LES TENANTS DE LA PÉDAGOGIE TRADITIONNELLE IMPOSENT
A L'ENFANT DE CONSCIENTISER QU'IL APPREND

Les pédagogies dites "traditionnelles" insiste sur le travail de conscience que doit réaliser l'apprenant pour acquérir de nouvelles notions. Elles insistent très souvent sur la métacognition.
La "métacognition" c'est-à-dire - la "Connaissance personnelle d'un individu sur ses capacités et ses fonctionnements cognitifs."- est le maître mot de l'enseignement transmis aux enseignants en formation. Nombreux sont les sujets de concours qui tournent autours de cette thématique, les conseillers pédagogiques et PEMF (formateur pour enseignant débutant) insistent pour que les élèves puissent avoir une "conscience" du processus d'"apprentissage".
Pourtant, les enfants apprennent à parler sans qu'on le leur enseigne et sans avoir conscience de comment ils ont fait pour "réussir" à parler.
Les pédagogies nouvelles comme celles de Montessori, de Freinet, de Decroly, de Frohel ... mettent en avant la dynamique naturelle d'apprentissage de l'enfant qui est bien souvent inconsciente.
Diane Huot et Richard Schmidt exposent cette dichotomie pédagogique concernant l'apprentissage d'une langue étrangère :
"De cet ensemble de propositions se dégagent deux grandes orientations, à savoir un enseignement de type scolaire et un enseignement de type naturel. L’enseignement scolaire favorise un mode d’appropriation dans la classe par des réflexions, des explications et des raisonnements à propos de la L2. L’enseignement de type naturel favorise une approche en classe simulant le plus possible les conditions d’appropriation en milieu naturel. La première orientation, dite aussi traditionnelle, s’appuie sur l’étude réflexive de la langue. Il s’agit alors d’un enseignement, décontextualisé, axé davantage sur la forme des éléments de la L2. La seconde orientation s’appuie sur la communication et l’interaction, comme c’est le cas dans l’approche communicative où l’enseignement, mis en contexte et motivant, est principalement axé sur le sens du message. " Conscience et activité métalinguistique. Quelques points de rencontre, 1996
Célestin Freinet répond à ceux qui s'opposent à sa "méthode de lecture" :
"On nous objecte souvent que ce qui est vrai pour le langage ne l'est pas forcément pour les autres disciplines. Mais pourquoi un processus qui réussit à 100% pour une des acquisitions les plus délicates ne serait-il pas valable pour les autres conquêtes ?" (Oeuvres pédagogiques 2. Celestin Freinet p 422)

7% DE BEBES INCAPABLES DE MARCHER ?

Si nous apprenions aux enfants à marcher comme nous leur apprenons à lire, 7 % des bébés ne sauraient jamais marcher et 11 % marcheraient avec de graves dysfonctionnements. Seul une minorité serait capable de courir.
Ces pourcentages factices pourraient être réels !
En effet, en France, 7 % des adultes de 18 à 65 ans ayant été scolarisés en France sont illettrés soit 2,5 millions de personnes, 11% éprouvent des difficultés graves ou fortes dans les domaines fondamentaux de l'écrit. (INSEE, 2011).
Si on observait et on respectait vraiment les enfants, on ferait confiance en leurs capacités exceptionnelles à apprendre. Ainsi, on trouverait les moyens efficaces de les accompagner dans leur cheminement intellectuel pour apprendre.
 Au lieu de cela, en dictateurs autoritaires, arrogants et condescendants, nous leur imposons nos procédés d'apprentissage d'adultes" Répétants.

De cette manière, non seulement nous cassons la confiance qu'ils ont de leurs propres capacités à apprendre mais de surcroit nous les freinons dans leur cheminement vers la compréhension du monde.
La formidable force de vie que possèdent les enfants les amène à  apprendre malgré ces interventions autoritaires d'adultes.
Cependant, les plus fragiles, qui ont vécu des expériences traumatisantes perdent confiance en leurs propres capacités et s'éloignent volontairement de l'apprentissage pour se "protéger".
Il est urgent de faire une révolution pédagogique.